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camille marion

  • Les arbres voyagent la nuit (Aude Le Corff) - chronique de Camille #03

     

    LES ARBRES VOYAGENT LA NUIT

    Aude LE CORFF

    Stock - 19€

     

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    « Manon semble lire dans ses pensées :

    - Alors, tu as emmené tes amoureuses sur la dune ?

    - Comment ? Euh, oui, certaines d'entre elles.

    - C'est mignon.

    Elle lui parle comme si c'était lui, le petit garçon.

    - Tu les as embrassées ?

    - Oui.

    - Vous aviez le vertige ?

    - Oui, pour différentes raisons !

    - Est-ce que vous pouviez toucher les nuages ?

    - Presque...

    - Les étoiles aussi, le soir ?

    - J'en ai rapporté plusieurs, dans mon sac à dos.

    Manon sourit à l'évocation de cette image. »

     

     

     

    Depuis que sa mère a quitté la maison en ne lui laissant qu'une lettre, Manon est devenue solitaire, parlant aux fourmis et aux chats, tandis que son père passe ses journées à attendre un signe de sa femme, sombrant dans la dépression et délaissant sa fille. La rencontre de la fillette avec Anatole, un professeur de français à la retraite, qui va l'apprivoiser en lui lisant Le Petit Prince va permettre à Manon de retrouver la joie de vivre et au vieillard un peu de compagnie et d'espoir. Autour de cette belle amitié se tissent les histoires de Pierre, le père de la fillette et de Sophie, sa tante. Ces quatre personnages décident alors de partir au Maroc pour retrouver Anaïs, la mère de la petite fille...

     

     

     

    Les arbres voyagent la nuit, c'est d'abord le récit d'une amitié, de deux êtres extrêmement seuls qui trouvent du réconfort et un peu de chaleur humaine en entretenant une relation simple et sincère.

     

    Grâce à tous ces existences qui s'entremêlent, Aude Le Corff aborde de nombreux thèmes dans ce premier roman : la relation enfant-vieillard bien sûr, mais aussi la dépression, la vie conjugale, tout en nous laissant voir comment la vieillesse est vécue par la société. Elle écrit sur les marginaux, les laissés pour compte. La lecture est fluide, les éléments de l'histoire se mettent en place progressivement et naturellement, tandis que le lecteur s'attache aisément aux personnages, présentés dans leur vulnérabilité, ce qui les rend plus touchants encore. Le Petit Prince fait office de guide tout au long du récit et l'histoire d'Anatole et Manon n'est pas sans rappeler celle du petit garçon et du renard.

     

     

     

    Les arbres voyagent la nuit, c'est un livre qui fait du bien ; positif et lumineux. C'est une histoire dans laquelle chacun tente de s'apprivoiser et de trouver sa place auprès des autres. Un joli roman de printemps pour les amoureux de la poésie (et les autres).

     

  • Frangine (Marion Brunet) - chronique de Camille #02

    FRANGINE
    Marion BRUNET
    Sarbacane, 14€90

     

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    « Je ne suis pas le héros, mais je suis

    Le bavardage et la digression
    L'oreille et les mots pour essayer de dire ce qui est à entendre, ce qui est à l'envi :
    Les désenchantements et les éclats de bruit

    En ces temps peu lointains où Pauline découvrait

    Le monde
    Le cruel
    Le normal
    et la guerre,

    ma mère et ma mère, chacune pour soi mais ensemble, vivaient de leur côté des heures délicates.

    C'est à moi qu'il revient de conter nos quatre chemins. Parce que j'aime ça, d'abord, dérouler les histoires comme on crée un langage ; et aussi pour que les choses soient claires, évidemment.

    Comment comprendre, sinon ? »

     

    Pauline et Joachim sont deux adolescents qui vivent avec leurs mères et mènent une existence
    relativement tranquille. Joachim est amoureux de Blandine et entame sa terminale, tandis que
    Pauline va entrer au lycée. La particularité de leur famille n'a jamais été un problème, jusqu'à ce que
    la discrète Pauline soit victime de harcèlement et perde pied.

    Frangine est un roman qui colle de près à l'actualité, puisqu'il s'agit de l'histoire d'une famille
    homoparentale qui est confrontée à l'homophobie et à l'ignorance d'une partie de la population,
    du fait de sa différence. Le sujet est abordé de manière délicate et les questions inhérentes à cette
    situation peu connue sont traitées à travers le regard des deux adolescents. Le roman se construit
    sur la relation de Joachim, le narrateur, et Pauline, sa petite sœur. C'est l'histoire d'une évolution,
    de comment se construire lorsqu'on est confronté au regard des autres, jugés pour ce que l'on n'a
    pas choisi, pour une situation que l'on vit parfaitement bien mais qui reste anormale aux yeux d'un
    certain nombre de personnes.

    L'intérêt de ce récit est de présenter plusieurs points de vue : le lecteur suit principalement
    l'existence de Joachim, ses questionnements amoureux, ses inquiétudes concernant sa sœur mais
    également la vie quotidienne de Julie et Maline, les deux mamans, leurs histoires respectives, les
    relations avec leurs parents... L'homoparentalité est au centre du récit mais Pauline et Joachim n'en
    restent pas moins des adolescents qui essaient de se construire, de s'affirmer et de trouver leur place dans le monde comme tous les jeunes.

    Frangine est un très joli récit, porté par une écriture légère et poétique et traitant avec simplicité
    d'un sujet rarement abordé en littérature jeunesse, au gré du quotidien de la famille, des souvenirs
    et des questionnements de chaque personnage. C'est un roman optimiste qui pose la question de
    la différence, du choix de vivre sa vie comme on l'entend et le mieux possible. Joachim, Pauline,
    Maline et Julie sont quatre personnages extrêmement attachants, finalement extrêmement banals
    et qui aspirent à la même tranquillité que n'importe quelle famille dite « traditionnelle ».

  • La première chose qu'on regarde (Grégoire Delacourt) - chronique de Camille #01

    LA PREMIERE CHOSE QU'ON REGARDE
    Grégoire DELACOURT
    JC Lattès, 17€

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    La première chose qu'Arthur Dreyfuss regarde, ce sont les seins des femmes.


    Arthur Dreyfuss aimait les gros seins. Il s'était d'ailleurs demandé, si d'aventure il avait été une fille, et parce que sa mère les avait eus légers, sa grand-mère lourds, du moins dans le souvenir des étreintes asphyxiantes, s'il les aurait eus gros ou petits. Il trouvait qu'une poitrine conséquente obligeait à une démarche plus cambrée, plus féminine, et c'est la grâce de ces silhouettes en délicat équilibre qui l'enchantait ; le bouleversait parfois.



    C'est ainsi que commence ce roman. Pourtant, les poitrines opulentes n'en sont pas le sujet, bien que
    cette question de la taille y revienne régulièrement. Non, ici, il s'agit d'une histoire d'amour. Arthur
    Dreyfuss a vingt ans, il est garagiste et vit dans un village perdu, dans une petite maison au bord de
    la départementale. Sa vie est tranquille, rythmée par les journées au garage de PP, quelques lectures
    et quelques séries en DVD. Jusqu'au jour où Scarlett Johansson sonne chez lui, page 24.

    La première chose qu'on regarde est une histoire d'amour, une histoire sur les faux-semblants et
    les illusions. On y trouve une réflexion subtile sur le culte de l'apparence et de la beauté. Mais, plus
    encore, on retient de ce récit un air d'Amélie Poulain, distillé par la présence de gens simples, de
    gens qui cherchent le bonheur, de gens qui tombent amoureux. On y lit la joie d'être à deux, mais
    surtout les blessures de l'enfance : un père qui a disparu, une petite sœur dévorée par un chien,
    une mère qui s'est tue et qui n'a plus jamais embrassé sa fille. Arthur et Scarlett, ce sont deux
    êtres cabossés qui se trouvent, qui tentent de se réparer, qui croient y parvenir. C'est un roman sur
    l'absence et sur deux solitudes qui se rejoignent. La première chose qu'on regarde est un livre à la
    fois léger et lourd, une histoire portée par une écriture sensible et parfois drôle qui rappelle que la
    beauté du bonheur est inhérente à sa fragilité.